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De l'autre côté du miroir

par Philippe Solal

Jamais je n'aurais imaginé, lorsque je me suis intéressé à la problématique OVNI, il y a déjà plus de 30 ans, que celle-ci me conduirait à mobiliser tout le savoir que j'ai acquis en philosophie, pour en percer le mystère. Jamais je n'aurais cru que ce sujet ne concernait pas le physicien (qui étudie les lois de la nature) mais bien plutôt le métaphysicien, qui s'occupe de ce qui est au-delà (meta) de la nature (physique), c'est-à-dire le monde de l'Esprit, seul réel.

On tournera en effet dans tous les sens qu'on voudra cette problématique, on ne pourra plus désormais éviter de parvenir à ce constat que nous avons mis plus de 70 ans à établir : à savoir que celle-ci porte sur la relation entre la matière et l'esprit, relation dont l'élucidation est à l'origine même de la philosophie.

Nous tenons désormais "le bon bout" si je puis dire, et nous ne nous laisserons plus entrainer vers le mouvement rétrograde qui consiste à privilégier une approche spécifiquement technologique, car la technologie n'a rien à faire là-dedans.

L'explosion des témoignages concernant les Expériences de Mort Imminente (EMI) a définitivement changé la donne en levant un coin du voile sur le monde spirituel et ses liens avec le monde phénoménal dans lequel nos existences se déroulent.

La difficulté que nous devons affronter est désormais, en premier lieu, d'ordre épistémologique: comment parler de l'invisible ? Aucun des concepts qui nous servent habituellement à décrire la matière et ses propriétés (espace, temps, température, force, énergie, etc.) n'est légitime car la matière se présente (en apparence) comme l'opposé absolu de l'esprit. Un objet matériel possède une masse, occupe un certain espace, évolue dans le temps, peut se décomposer etc. L'esprit possède les propriétés absolument inverses : une idée n'a pas d'étendue, ni masse, ni température, ni forme etc.

Pour parler de l'invisible il faudra donc avoir recours au plus ancien mode de connaissance utilisé par l'homme depuis qu'il tente de construire un savoir: l'analogie. C'est par analogie avec le discours portant sur le monde matériel que nous pourrons accéder à un discours sur le monde invisible.

Concrètement cela signifie qu'il nous faut, par analogie, nous représenter le Réel comme un champ de conscience dans lequel ne circule que de l'information. L'information (niveau auquel la physique quantique nous a fait parvenir) est le pont, le point intermédiaire ou de contact, entre le monde spirituel (nouménal) et le monde matériel (phénoménal).

Comme dans un cerveau où de l'information circule entre les neurones pour produire et combiner les représentations, le Réel est une immense conscience qui s'individualise en une infinité de foyers émetteurs ou récepteurs de l'information. Le monde phénoménal et matériel est alors le PRODUIT de cette circulation de l'information entre les consciences individualisées qu'on appelle les Soi. En ce sens, le monde phénoménal est une co-création, une création collective de l'Esprit et ce monde, notre monde, est comme le rêve collectif de nos âmes éternelles. Affirmer cela c'est faire de la métaphysique car nous ne sommes plus désormais dans la physique, nous sommes avant, à la source.

Cet immense cerveau cosmique pourrait aussi être comparé à un réseau internet, un gigantesque "web cosmique" comme l'écrivait Romuald Leterrier dans Ovnis et Conscience. L'agencement et la transmission de l’information crée la matière selon le même principe qui conduit, sur nos écrans d’ordinateur, des longues chaines de caractère à produire de l'image, du son, de la couleur, du relief, de la musique, c'est-à-dire les "qualia" par lesquelles la matière se manifeste à nous.

Le moi n'a alors accès qu'au monde phénoménal: il est passif car la sensation est un mode d'accès passif à la connaissance, là où le Soi est actif et créateur, puisque ce qui est pensé par lui se densifie en information et se matérialise dans la conscience du moi. Là est le secret du phénomène OVNI, par lequel notre propre transcendance nous fait signe selon le principe d'un retour du refoulé, car nous avons oublié notre essence spirituelle.

Rien de réel n'existe ainsi que la Conscience et la circulation de l'information qui en manifeste la vie et la vitalité. La vie de l'Esprit, en définitive, met face à face deux mondes en miroir: le monde du nouménal (seul réel) et le monde phénoménal qui est son miroir inversé puisque la matière se donne à voir comme l'inverse de l'esprit. Il nous faut désormais aller de l'autre côté du miroir, comme Alice, et retrouver l'ordre véritable des choses, celui qui nous apprend que nous sommes des êtres spirituels temporairement incarnés dans la matière.